le point imaginaire

D’après un fait réel, à l’Eglise de Montbéliard dans le Doubs, pendant la guerre 39-45

Un soir, dans son église bien remplie, le curé célèbre la messe de minuit. Il regarde au premier rang de bons chrétiens, des hommes habillés de manteaux de cuir noir, qu’ils n’ont même pas retirés dans l’église. C’est l’Occupation, la ville résonne de pas martiaux et tout ce monde, Français comme Allemands, se retrouvent à l’église, comme par une étrange trêve.

Quand l’heure de dévoiler la crèche arrive, elle a été apportée sur un brancard, bâchée comme une 202, le curé retire la couverture et apparaissent sur le socle des centaines de santons, des petits êtres d’argile, peints soigneusement à la main. On reconnaît les rois mages, les animaux de l’étable, les anges et, ce qui soulève un murmure dans l’église, sur la poitrine de la Sainte famille, - qu’on appelle ainsi parce qu’elle est sdf, à la recherche d’un toit pour la nuit-, des étoiles jaunes cousues sur les blouses ; de ces étoiles que les juifs ont obligation de porter dans les rues de l’époque.

Les hommes en cuir sortent en claquant leurs missels sur les bancs, très en colère. Ils laissent la messe se tenir, et le curé faire son homélie, rappeler au cœur de la nuit que cette famille était juive de la lignée de David, qu’elle était non le berceau de l’humanité, mais le berceau de notre humanité.

Peut-être que de nos jours, la crèche à installer dans l’église serait celle-ci, quand notre humanité est à ce niveau d’extinction.

photo @jyrag sans juifs, sans arabes, sans migrants, ni africains

repris d’une archive anthropia # blog - décembre 2007

écrit ou proposé par Christine Simon
(site sous licence Creative Commons BY-NC-SA)
première mise en ligne le 25 décembre 2017 et dernière modification le lundi 25 décembre 2017
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