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La vie est un système, un sistème, avec des si qui envisagent, qui examinent les possibilités. Avec des si, on peut tout faire, on mettrait Paris en bouteille et si les poules avaient des dents, on irait sur la lune.

Le si rend tout possible, du moins à le postuler. C’est l’excipient de la vie, son aliment à l’infini. Tiens, si on mettait les poules en bouteilles, elles tourneraient autour de la terre. Et les si auraient des dents, enfin les scies en ont. Quant à Paris, si on ouvrait la bouteille…

Parce qu’à si, si et demi, et des suppositions on peut en faire beaucoup. Là je vous les aligne, les si, j’en vois partout. Et si je suis une femme, serais-je aussi une poule, et si n’ai pas de tire-bouchon, comment j’ouvre Paris, avec les dents ?

Le si, c’est magique. Tiens, si je dis, et si j’allais en Amérique, d’un seul si, je m’envole. Je pose le si, retiens mon vol, monte à Roissy, compte jusqu’à six, et ça y est, suis en Amérique. Mais si j’en doute, je n’en suis plus si sûre, tautologie. Et si je ne suis pas sûre, alors je reste au sol, là.

Avec les si, la route est pleine de bifurcations, on les pose en supposant, et si j’allais à droite ou si j’allais à gauche, on voit que parfois si un si exclut l’autre, le second aussitôt peut exclure le premier, ça fait un va-et-vient et c’est le si qui donne le la.

Le si, ça paraît simple. S’il pleut, je prendrai mon parapluie. Une hypothèse, ça subordonne la solution, parce que s’il pleut, hein, qu’est-ce qu’on peut faire d’autre que prendre son parapluie. Et bien, ce serait vrai, s’il n’y avait le si. Car avec le si, on peut s’interroger. Je me demande si je ne ferais pas mieux de prendre mon chapeau ou alors de mettre un bonnet. Le si, c’est ça, ça vous met souvent le cul entre deux chaises, comment dire, le si ça hésite, une décision, une question, et des fois les deux à la fois.

Et si on ne sait pas, alors on reste au lit. Le si, ça fait douter, et s’il suffit d’un si pour qu’un autre disparaisse, c’est que ce que tu vois n’est que mirage et doute, alors tu doutes et tu redoutes le redoutable doute. Le si, ça creuse l’incertitude. Et même au singulier, si si n’est plus qu’un si, il n’en est pas moins si. Un seul si y suffit et tout est supposé.

N’ai pas toujours pensé que si était comme ça. Le si des scientifiques, preuve de l’intelligence qui se pose des questions, If …. Then, un raisonnement, quoi de plus assuré. Avec une entrée, SI ceci ou cela, et une sortie, ALORS il se passe telle ou telle chose. Ça se boucle, le si, si on l’ouvre, il faut le fermer.

La belle allure du postulat, si tu le poses là et qu’il n’est pas ailleurs. Ah, c’est si excitant, si ceci est cela, on serait plus certain, chaque chose bien à sa place. Si ceci est cela, j’irai mieux, je voyagerai plus loin. Et si je vais en Silésie, je n’irai pas en Sibérie. Et toi non plus. Le si va à tout le monde, on le prête volontiers. Si, si, le si c’est aussi ça, le si des certitudes.

C’est à ce point ce si, que tout est plus ou moins. Et ça par tous les temps, s’il n’avait plu, j’y serais allée, si c’était vrai, ce serait bien, s’il le veut, je le ferai. Je deviens siphonnée à force de tous ces si. Avec ces si, je le vois bien, je scie ma branche, devant, derrière, futur, passé, et même présent. Si Versailles m’était conté, versouille n’existerait pas, mais si c’est versant, je serai renversée, alors je reste au lit, on ne sait jamais.

Intermezzo. Je siffle une scie. Si dièse, on s’engage, si bémol on s’retire, si bécarre on r’démarre.

On pourrait sans souci faire disparaître le si, il ne faut pour ça que revenir au la, car si on doute ici de tout ce si en soi, on chante un peu plus grave, on a le là tout de suite.

C’est bien le là,
C’est plus simple que le si.

La vie est un laboratoire, un làboratoire, qu’on parcourt pas à pas.


dessin original d’osvaldo rodriguez
crédit photo christine simon

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