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Comment commence une amitié, un sourire timide ou large, une tentative ou une invite, forte, immédiate, et ça y est, ou alors les atomes d’un corps qui parlent aux atomes d’un autre corps, on ne dit pas assez le rôle du corps dans l’amitié, cette amitié-là est née dans un appartement, elle en robe africaine, toi en salopette rose, elle était enceinte pour la troisième fois, tout de suite un lien, se sentir accueillie, et toi qu’avais-tu à donner, rien qui n’ait été reçu, ton peu, ton manque, qui n’ait été perçu, vient-on à l’amitié par ce creux en soi, cette soif de parole, d’un tilt entre deux esprits, d’une curiosité de l’autre, qui rejoint sa reconnaissance de quelque chose d’ancien, l’amitié, ce passé qui resurgit sous une autre forme, ce futur qui s’installe, le deux en un, la rencontre, quelques sèmes pour cailloux, comme ça que ça prend, que ça se cimente, il faut beaucoup aimer une femme, l’admirer pour ses hauts faits, accepter d’entrer quand ça flanche, tenir bon quand ça tangue, la consoler quand elle pleure, la complimenter quand elle est belle, elle l’a toujours fait pour toi, on espère l’avoir fait pour elle, des jours, des mois, des années, presque quarante ans, où l’on n’est plus celle qu’on était, où elle n’est plus celle qu’elle était, pourtant quelque chose d’essentiel n’a pas changé, mais quoi, on revient et l’acceptation toujours, se sentir acceptée au plus profond, on craint parfois, une mutation, un engagement incompris, serait-ce moins fort, on hésite, on évite, on y retourne parce que plus forts que tout, les souvenirs, ils forgent les conversations, les émaillent de mots, d’images qui font résurgence, ils consolident le présent, jusqu’à ce que le présent émerge à nouveau dans sa nouvelle dimension, ça y est, l’amitié sans cesse renouée, dans les replis de l’infini changement on trouve de quoi nourrir la suite, tiens, elle fait ceci à présent, tiens elle a perdu cette habitude, tiens elle s’intéresse à ça qui ne l’intéressait pas auparavant, toujours trouver bien ce que l’autre trouve bien et quand pas tout à fait, ça intrigue, tiens pourquoi, elle argumente, elle influence, et sa propre vision alors change, chacune informe chacune, le monde comme il va elles le regardent ensemble, elles le parlent et calculent ensemble la nouvelle distance aux choses, elles avancent, peut-être ça qui dure, elles ont toujours avancer, parfois en se heurtant, mais sont toujours restées debout face à l’autre, femmes poteaux comme on dit sous d’autres cieux, elles négocient la vieillesse qui arrive comme un virage de nouveauté, sans renoncer aux ambitions spirituelles, elles ne s’abstiennent pas de vivre, et leurs peurs sont moins fortes d’être dites, et leurs rires cassent les spirales de tristesse.

Il reste encore beaucoup d’aventures à traverser sur le chemin de leur amitié, heureusement le voyage se poursuit.

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