Quelques ekphrasis créées à partir des œuvres de Sophie André
ekphrasis 1 : petit portrait femme-chenille
Que dire de cette humanité, le visage, on n’en parlera pas, d’un côté la couleur d’une moitié de citron, suspendu par son bout et de l’autre côté le froid d’une demi-face sans doute d’une femme blanche, qui les veut, revendique cet étrange composite, pour quel récit qui partirait coiffé d’un chapeau rouge, masquant à peine la mèche d’un roux qui s’éteindrait, et pour barrer le tout le fourreau d’un sourire, figure du ying et yang à peine sardonique, l’œil en coin, cette immobilité se joue dans le suspens, quelque chose qui ronge l’âme, pas encore persona, peut-être juste un sens qui tend vers la lumière et ce profond silence qui ne sert plus à rien.
Ekphrasis 2 : nouveau monde
Coulures d’un pinceau trop chargé de matière, et c’est le premier plan, des sapins au lointain tendus vers l’infini, on respire le parfum d’une sève obsédante, seule rompt une harmonie de ballons transparents, le fond en éboulis, imagine les cascades, les trois strates qui accrochent les espoirs de cimaise, ce paysage versant d’un adret mordoré.
Ekphrasis 3 : la canopée
Domine la tempera, un buisson miroitant de son ton azurite vient gagner sur le jaune, en bas un dentelé d’écume qui pianote fait croire en un reflux de vagues disparues, contraste entamé, porosité gagnée, quand les pigments se croisent, enfin l’acceptation de ce tout mélangé.
ces textes sont initialement parus sur le site Tiers Livre de François Bon dans le cadre de la proposition 1 de l’atelier d’hiver 2018