goûter l’huître, comme d’un reconnaître qu’il s’agit, deux ou trois suffisent pour retrouver les soupers des soirées polissonnes, tête-à-tête amoureux et brasserie parisienne, dégustation secrète sur peau de nuit coquine, on se sustente du souvenir autant que du réel, l’odeur de marée, le goût du sel et ce gel consistant sur la langue, que tous ne savent apprécier, tout aurait de quoi repousser, mais non, on appartient à la cohorte des yeux réjouis, des têtes renversées qui réceptionnent le nectar, bouche ouverte, et même qui mâchent, qui avalent et aiment la sensation de coulée vive, froide, dans le conduit spécial fête, que le goût de l’huître, c’est la tête d’un qui se réjouit serviette et fourchette dans la main, c’est le petit regard dans l’assiette de l’autre, combien de coquilles vides, et les yeux d’un amant décidé à tout prendre, même le cérémonial salissant, eaux grises des fonds de plats, collecte rapide de fin de mets pour faire disparaître ce qui n’a plus d’intérêt, mais en soi comme perdure ce coup d’œil, naïveté des Noëls en famille, aux reliefs nacrés des conques dégustées, quête d’une perle, espoir qu’on a appris des livres d’aventure et qui jamais ne se réalise, mais qui, dans le tremblement qui clôt la dégustation, donne à aimer le creux tout autant que le goût de ce qu’on sait ne pas être une méléagrine.